Auteur/autrice : amg

Le Tribunal administratif de Grenoble enjoint à la préfète de l’Isère de mettre en place des mesures alternatives non dématérialisées

Cinq associations (ADA, APARDAP, ODTI, IDH et la Cimade) ont saisi le juge des référés pour demander que la préfète de l’Isère mette en place des mesures alternatives aux procédures dématérialisées (notamment le téléservice « démarches simplifiées ») pour certaines demandes de titres de séjour ne relevant pas de l’ANEF (Administration Numérique pour les Étrangers en France).

Les associations soutiennent que la préfète n’a pas exécuté une précédente ordonnance du 28 mars 2025 qui imposait déjà de telles mesures alternatives, ce que la préfète conteste.

Le juge constate que le système mis en place n’est pas réellement opérationnel et donc que la préfète n’a pas exécuté correctement l’ordonnance du 28 mars 2025.

Par décision du 21 juillet 2025 (ordonnance n°2506085), le Tribunal administratif de Grenoble enjoint à la préfète de l’Isère de mettre en place dans un délai de 2 mois des mesures alternatives non dématérialisées sous astreinte de 500€ par jour de retard.

Détail de l’ordonnance ci-dessous :

2025-07-21 Décision du Tribunal Administratif de Grenoble

Tero Loko, un film d’Isalia Petmezakis

Le petit village de Notre-Dame de l’Osier, en Isère, connaît une effervescence inédite grâce à Tero Loko, une association accueillant des personnes précaires, notamment réfugiées, autour d’activités de maraîchage et de boulangerie. Ce chantier d’insertion leur offre un accompagnement global pour se reconstruire et lever tous les freins à l’emploi.

Tero Loko parie aussi sur l’accueil pour dynamiser le village en favorisant l’économie locale et les rencontres. Initialement confrontée à l’hostilité, l’initiative a su rallier bénévoles et habitant·es autour de valeurs communes. Le film retrace les six premières années de cette aventure, illustrant comment la solidarité transforme un territoire et crée des opportunités pour toutes et tous.

Rapport du Défenseur des droits sur l’Administration numérique pour les étrangers en France

Alors que l’ANEF, plateforme déployée depuis 2020, visait à simplifier les démarches administratives pour les ressortissants étrangers, le Défenseur des droits publie ce jour le rapport « L’Administration numérique pour les étrangers en France (ANEF) : une dématérialisation à l’origine d’atteintes massives aux droits des usagers ».

En 2020, les outils de prise de rendez-vous en ligne dans les préfectures étaient saturés, et de nombreux ressortissants étrangers ne parvenant plus à obtenir de rendez-vous ont saisi le Défenseur des droits. Le confinement et la fermeture des guichets préfectoraux ont accéléré la mise en place de solutions dématérialisées de demande de titres de séjour. Dans ce contexte, l’institution a commencé à recevoir des réclamations en lien avec ces nouveaux outils.

Quatre ans plus tard, le nombre de réclamations reçues par le Défenseur des droits pour ces raisons est considérable, et le droit des étrangers est devenu le premier motif de saisine de l’institution. En 2023, ces demandes représentaient 28 % des réclamations reçues, et plus de 75 % d’entre-elles concernaient des difficultés rencontrées avec les services préfectoraux, dans le cadre d’une première demande ou de renouvellement d’un titre de séjour.

Un outil aux nombreuses limites

Ces nombreuses réclamations montrent que l’ANEF, malgré des avancées certaines et les ambitions du projet, ne tient pas ses promesses de simplification des démarches des usagers, de fluidification des circuits et des procédures, et d’optimisation des logiciels utilisés par les agents préfectoraux.

Problèmes techniques persistants, choix ou impensés dans la conception de l’outil sources de difficultés, déploiement parcellaire et manque d’informations aux usagers… Déployé au terme d’expérimentations insuffisantes, l’outil souffre de nombreuses limitations et de dysfonctionnements qui affectent tant le dépôt que l’instruction des demandes de titres.

Le Défenseur des droits observe également dans ses réclamations que les services d’accueil et d’accompagnement spécifiques, notamment pour les personnes éloignées du numérique – le Centre de contact citoyen (CCC) et les Points d’accueil numériques (PAN) – ne permettent pas de surmonter les difficultés : échanges infructueux, complexité d’accès, manque de qualification du personnel, manque d’effectifs, etc.

Des atteintes graves aux droits des usagers

Lorsqu’une personne ne peut pas accéder à une démarche, ou la finaliser, elle risque de se retrouver en situation irrégulière, sans titre de séjour, alors même qu’elle en remplirait les conditions légales.

Les dysfonctionnements de l’ANEF ont donc des répercussions très concrètes sur la vie des personnes étrangères. Perdre son droit au séjour peut entraîner une perte d’emploi, la suspension des prestations sociales, des difficultés d’accès aux soins, ou encore des ruptures dans la scolarisation des enfants. Ces situations engendrent des atteintes graves aux droits, comme le droit de mener une vie privée et familiale normale, le droit de propriété, l’intérêt supérieur de l’enfant…

Les recommandations du Défenseur des droits

  • L’ampleur et la gravité des atteintes constatées par le Défenseur des droits imposent l’adoption de mesures urgentes. Face à cette situation, l’institution formule 14 recommandations essentielles pour garantir l’accès aux droits des usagers, notamment :
  • Intégrer dans le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile une disposition reconnaissant le droit de réaliser toute démarche par un canal non dématérialisé, sans condition préalable,
  • Automatiser le renouvellement automatique des attestations de prolongation d’instruction (API) et créer, pour les personnes sollicitant la régularisation de leur situation administrative, une attestation dématérialisée créatrice de droits délivrée après vérification de la complétude du dossier,
  • Améliorer l’information donnée aux usagers sur les sites internet des préfectures, quant aux modalités de dépôt des demandes de titres et la mettre à jour régulièrement.
  • Sans remettre en cause le principe même de l’ouverture d’une voie dématérialisée pour le dépôt des demandes de titres de séjour, ces recommandations mettent en avant les modifications qui s’imposent pour faire de l’ANEF un véritable outil de simplification, au service de ses usagers.

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